1959
Par Yves Klein
Le Feu
![]() | Peinture de Feu sans titre (F 27 I), ca. 1961 Carton brûlé sur panneau 250 x 130 cm © Succession Yves Klein c/o ADAGP, Paris |
Yves Klein, extrait de "Conférence de la Sorbonne », 3 juin 1959
"Quelques-unes de mes œuvres les plus récentes sont des cercueils et des tombes. Et dans le même temps, je réussissais à peindre avec du feu, utilisant pour ce faire des flammes de gaz particulièrement puissantes et dessiccantes, dont certaines avaient près de trois à quatre mètres de hauteur. Je les faisais lécher la surface de la peinture de telle sorte que celle-ci enregistrait la trace spontanée du feu.
En somme, mon propos est double : tout d’abord enregistrer l’empreinte de la sentimentalité de l’homme dans la civilisation actuelle ; et ensuite, enregistrer la trace de ce qui précisément avait engendré cette même civilisation, c’est-à- dire celle du feu. Et tout ceci parce que le vide a toujours été ma préoccupation essentielle; et je tiens pour assuré que, dans le cœur du vide aussi bien que dans le cœur de l’homme, il y a des feux qui brûlent.
Tous les faits qui sont contradictoires sont d’authentiques principes d’une explication de l’univers. Le feu est vraiment l’un de ces principes authentiques qui sont essentiellement contradictoires les uns aux autres, étant en même temps la douceur et la torture dans le cœur et dans l’origine de notre civilisation.
Mais qu’est-ce qui provoque en moi cette recherche de la sentimentalité à travers la fabrication de super-tombes et de super-cercueils ? Qu’est-ce qui provoque en moi cette recherche de l’empreinte du feu? Pourquoi faut-il que j’en cherche la Trace elle-même ?
Parce que tout travail de création, sans tenir compte de sa position cosmique, est la représentation d’une pure phénoménologie – tout ce qui est phénomène se manifeste de lui-même. Cette manifestation est toujours distincte de la forme, et elle est l’essence de l’immédiat, la trace de l’Immédiat."
Yves Klein, extrait du « Manifeste de l’Hôtel Chelsea», 1961