• "L’opéra-théâtre de Gelsenkirchen", texte de Frédéric Migayrou extrait d'un catalogue d'exposition

Article, 2020

"L’opéra-théâtre de Gelsenkirchen", texte de Frédéric Migayrou extrait d'un catalogue d'exposition

Frédéric Migayrou

Au moment de son exposition à la Galerie Schmela, à Düsseldorf, en mai 1957, Klein prend contact avec les membres du groupe ZERO, dont Norbert Kricke. Celui-ci l’invite à participer au concours pour une intervention artistique à l’opéra-théâtre de Gelsenkirchen.

Werner Ruhnau, l’architecte du projet, avait rencontré Klein à Paris un mois plus tôt lors de l’exposition «Norbert Kricke», à la galerie Iris Clert, et un an après qu’il eut reçu la commande du théâtre et ouvert sa propre agence. Alors très proche du groupe ZERO et cherchant à définir les préceptes d’une «non- architecture», Ruhnau adhérera cette année-là au Groupe d’études d’architecture mobile (GEAM), fondé par Yona Friedman. La rencontre avec Ruhnau aboutit à une proposition d’installation de larges reliefs dans le grand foyer du théâtre, ouvert sur la rue par une grande baie vitrée apportant une transparence sur la totalité du bâtiment.

Le mur de verre de cette architecture, encore fortement influencée par Ludwig Mies van der Rohe, offre une totale visibilité sur les circulations intérieures – un système de passerelles et d’escaliers à différents niveaux – et procure un vaste volume où les corps semblent portés et suspendus dans une atmosphère baignée d’une luminosité bleutée.

Klein travaille avec Rotraut à la réalisation des « Reliefs Éponges », détachés du mur comme l’étaient les monochromes, en vue d’accentuer l’autonomie de la couleur. Les monumentales surfaces IKB font vaciller les frontières pour définir une ambiance; l’architecture doit être transfigurée physiquement, absorbée par ce qui l’environne en cette «non-architecture». Alors s’érige un authentique espace immatériel, que suivra l’étude pour un Temple des éléments (1957) : un café à proximité du théâtre, auquel s’intégrait un dispositif combinant l’énergie de l’air, de l’eau et du feu.

extrait du texte de Frédéric Migayrou, "Architectures du corps intensif", catalogue de l'exposition " Le ciel comme atelier - Yves Klein et ses contemporains " présentée au Centre Pompidou Metz en 2020